Une ordonnance non ratifiée deviendrait légale : dangereux tour de passe-passe pour la démocratie

Une démocratie et les droits du Parlement durablement confinés avec une décision étonnante du Conseil Constitutionnel dont on se rappellera utilement que les juges ont été des personnalités politiques

Ca l’air un peu technique mais les enjeux sont d’ampleur car dans notre régime démocratique le Parlement nous représente et devrait être l’un des garants de nos droits. Rappelons-nous l’affaire Benalla et le rôle-clef de la commission d’enquête du Sénat. Donc, nos députés sont nos représentants et devraient être indépendants du Gouvernement (même si on voit bien les limites du système depuis 2017).

Ainsi, ce sont nos parlementaires qui votent les lois et contrôlent leur application dans tous les domaines prévus par la Constitution et le Gouvernement les met en œuvre. Parfois, sous le coup de l’urgence notamment, le Parlement autorise exceptionnellement (« habilite ») le Gouvernement à prendre des mesures de nature législative par « ordonnances » : mais une loi le prévoit, avec un cadrage des mesures possibles et un calendrier. Ensuite, le Parlement doit ratifier ces mesures, sinon elles « tombent ».

Mais, cela, c’était avant le 28 mai. Avant que le Conseil constitutionnel saisi d’une question concernant une installation éolienne, écrive qu’une ordonnance qui n’a pas été ratifiée par le Parlement pourrait avoir rétroactivement force de loi une fois passé le délai d’habilitation si le projet de loi de ratification de l’ordonnance a bien été déposé dans le délai donné. Donc : une validation implicite (ce qui n’est pas du tout l’esprit de la Constitution, pourtant).

Donc le contrôle par le Parlement disparaît. Un boulevard s’ouvre pour le Gouvernement mais les citoyens peineront à contester quoi que ce soit avec cette évolution car il est moins ardu d’aller devant le juge pour une mesure réglementaire que d’aller déposer une question prioritaire de constitutionnalité.

Cette évolution n’est ni « moderne », ni nécessaire, ni bienvenue. Surtout à l’heure où les consultations publiques se réduisent comme peau de chagrin et où les dispositifs permettant d’associer les citoyens sont brocardés comme étant des contraintes administratives insupportables et inutiles.

Et la démocratie dans tout cela ? Confinée et c’est bien tout le problème avec cette décision qui est intervenue juste avant une nouvelle loi d’habilitation par ordonnances « fourre-tout ». Les sages du Conseil Constitutionnel n’ont visiblement pas oublié qu’ils ont été des personnalités politiques… Dommage pour le Parlement et la démocratie.

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